L’église Saint-Pierre de Dieulivol

« Près des ruines du vieux château et de l’église de Dieulivol, on domine la riche et gracieuse vallée du Drot ; on y jouit certainement d’un des plus beaux points de vue du département. » (Edouard Féret, 1874)


Située au sud de l’enceinte aujourd’hui disparue de l’ancien château, aux abords d’un à-pic rocheux qui domine la vallée du Drot, l’église de Dieulivol a probablement été remaniée au cours des siècles, lors de la Guerre de Cent Ans puis après les Guerres de Religion. Elle a malgré tout conservé une grand unicité de style. Bâtie selon un plan rectangulaire, sa construction en grand appareil permet de la dater du XIIIe siècle. Les seuls éléments postérieurs sont le clocher-mur, sur la façade occidentale, et le portail primitif, partiellement muré au profit d’un portail plus petit, qui semblent tous deux appartenir au XIVe ou au XVe siècle. Le porche, daté de 1717, et la tour d’horloge construite contre le clocher-mur, sur le côté nord-ouest de l’église, sont modernes. Une visite de 1804 ayant jugé l’église en médiocre état, mal entretenue et trop enfoncée, on fit rehausser les murs de la nef.

eglise

Eglise de Dieulivol (photographie Benoît Pénicaud)

La nef est unique et voûtée en berceau brisé. L’historien et archéologue girondin Léo Drouyn, venu visiter Dieulivol en 1859, estimait que l’église n’avait pas été à l’origine voûtée. A l’intérieur de la nef, quatre travées séparées par des colonnes engagées supportent des arcs doubleaux en plein cintre. Dans son ouvrage consacré aux vieille églises de la Gironde l'archiviste Brutails fait remarquer que le maître d'œuvre a dissimulé la rencontre des berceaux avec les murs de tête sous une sorte de doubleau qui rappelle le formeret des voûtes gothiques.

L'église est éclairée par six fenêtres percées dans les murs nord et sud, et une septième au centre du mur du chevet. Les fenêtres sont en plein cintre. Les vitraux sont l’œuvre, du maître verrier bordelais Joseph Villiet. Dans le chœur, le vitrail est consacré à saint Pierre. Aucune trace de l’ornementation originelle n’est visible. Seuls les chapiteaux de la nef, à peine sortis de l’épannelage, présentent une corbeille lisse à masques d’angles rudimentaires, surmontée d’un tailloir parsemé d’étoiles cerclées en plat relief.

La nef se termine par un chœur carré à chevet plat.

A l’extérieur, sur les murs gouttereaux, l’église est protégée par des contreforts. Les contreforts d’angle se réduisent eux à un empattement, à une simple surépaisseur des murs.

Le clocher-mur à pignon triangulaire est percé de trois baies pour les cloches. Depuis le porche on jouit d’une belle vue sur la vallée du Drot.

L’église est dédiée à Saint-Pierre, saint tutélaire de la paroisse de Dieulivol. Elle a été inscrite aux Monuments historiques par un arrêté en date du 24 décembre 1925.


Vue de l'église depuis l'ancien presbytère
Eglise depuis le jardin du presbytère

Eglise vue depuis le jardin de l'ancien presbytère 
(photographie Benoît Pénicaud 2020) et carte postale ancienne

L'église de Dieulivol renferme d'admirables peintures murales exécutées en 1938-1939 par le peintre italien Giovanni Masutti. Les sujets furent proposés à l’artiste par Dom Joseph-Réginald Biron, curé de Dieulivol de 1927 à 1939. Dom Biron (1876-1947) appartenait à l'ordre des Bénédictins, il était membre de la Société archéologique de Bordeaux, et auteur de plusieurs articles et ouvrages d'érudition religieuse et historique notamment d’un Précis de l’histoire religieuse des anciens diocèses de Bordeaux et Bazas et, en 1928, d'un Guide archéologique illustré du touriste en Gironde. Dans l'église, Masutti a représenté le curé de Dieulivol dans le personnage de Saint-Benoît. Deux immenses scènes, de part et d'autre de l'autel, représentent le crucifiement de Saint-Pierre et la délivrance de Saint-Pierre. Au-dessus de la fenêtre du chevet Masutti a peint Dieu le Père émergeant des nuages, en un trompe-l'œil évoquant la voûte céleste. Il pose sa main gauche sur le globe et semble rassembler les fidèles de sa main droite ouverte. Masutti a aussi parsemé d’étoiles dorées la voûte azurée de la nef. Dans le chœur c’est une colombe blanche qui figure l'Esprit Saint. Alors que dans la partie basse de la voûte, ce sont douze portraits de saints qui se font face, six de chaque côté. Dans cette galerie de personnages on reconnaît au sud : saint François de Salles, saint Vincent de Paul, saint Ambroise, saint Jérôme, saint François d'Assise et saint Dominique ; et au nord : saint Jean-Marie Vianney, saint Louis, saint Augustin, saint Grégoire-le-Grand, saint Benoît, et saint Bruno.

Inauguration des peintures de l'église
Inauguration des peintures de Masutti dans l’église le 10 avril 1939  
(collection Benoît Pénicaud)

 

Dom Biron Saint-Benoît
A gauche portrait de Dom Joseph Réginald Biron, ancien curé de Dieulivol (collection Benoît Pénicaud).
A droite Saint-Benoît peint par Masutti (photographie Benoît Pénicaud)


Crucifiement de Saint-Pierre par Mazetti
Le crucifiement de Saint-Pierre (Masutti) , église de Dieulivol

Parmi les autres trésors de l'église : aux fonts baptismaux une statue en bois polychrome du XVIIIe siècle représente la Vierge Marie portant l'enfant Jésus.  A noter également la présence d'un ange en bois du XVIIIe siècle...


L'église côté nord et les contreforts

                    L'église côté nord  (photographie Benoît Pénicaud)

Porche et vue sur la vallée du Drot
Le porche ouvert sur la vallée du Drot  (photographie Benoît Pénicaud)

Une site toujours fragile qu'il convient de protéger !

Le plan cadastral de 1835 démontre que le chemin qui jouxtait autrefois l'église a fait jusqu'à 8 mètres de large. Ce chemin n'existe plus aujourd'hui. La falaise a  régressé de 10 à 17 mètres au moins depuis 1835. Ce recul inexorable lié à la nature géologique de la roche calcaire tendre et friable qui la constitue ainsi qu'à l'usure du temps mettait en péril l'existence même de l'église. Des blocs de rocher se détachaient épisodiquement menaçant d'entraîner avec eux les fondations de l'édifice.
En 1911 l’abbé Callen prévenait déjà que l'église de Dieulivol était "menacée de s'abîmer tôt ou tard, dans le vide, par suite des éboulements continuels de la roche qui la soutient" (L'Aquitaine, 24 novembre 1911). Au mois d'
avril 1986 la chute d'un bloc de rocher de plusieurs tonnes provoque l'inquiétude du maire de la commune Jean-Jacques Goulard : l'église peut s'effondrer à tout moment ! Il faudra finalement attendre encore vingt ans, en 2006, pour que la mobilisation du maire et de la population permette de recueillir les fonds nécessaire au financement des travaux de confortement du site avec l'aide des collectivités territoriales et grace à de généreux dons privés. Les travaux s'achèvent l'année suivante en 2007. Ils ont essentiellement consisté à dévégétaliser la falaise, à purger les blocs de rocher instables, à ancrer les blocs les plus gros, à poser un grillage plaqué contre la roche, à remplir de béton armé les bancs sous-cavés, et à appliquer du béton projeté pour protéger le rocher friable...


L'église avant les travaux de confortement de la falaise
Vue de l'église avant les travaux de consolidation de la falaise (photographie Benoît Pénicaud)
     

Quelques curés et desservants de la paroisse de Dieulivol  


1562 : Jehan Doublet
1669-1671 : Antoine Chanut
1694 : Ducledat 
1696-1697 : Dumas 
1698-1715 : Ducledat 
1715-1732 : Royre 
octobre 1732 : La Boual vicaire puis curé 
1761 : André Nau prêtre loco pastoris, religieux de l'abbaye de Saint-Ferme, curé de la paroisse Saint-Blaise des Clottes (Esclottes) en 1775
1762-1792 : Louis Paulin de Barry de La Barthe, écuyer, prêtre, docteur en théologie. Il prend possession de la cure de Dieulivol le 24 mars 1762
(on trouve aussi parfois son nom mentionné Du Barry de La Barthe ou Dubarry de la Barthe)

1802 (an X) : François Pellé 
1803-1804 (an XII) : Pierre Castenet
1820 : Jean-François Grenier (né en 1769) curé de Saint-Vivien-de-Monségur, Taillecavat et Dieulivol (an XIII - 1821)
1838 : Clément
1854-1892 : François Castéran 
1896-1901 :  Etienne Pigot (né en 1853)
1901 : Augustin Charruaud (né en 1850)
1910-1920 : Joseph Villeneuve (dit Yvan)

Le curé Villeneuve
Le curé Villeneuve
(collection B. Pénicaud)

1924 : Jehan Sauveroche
1927-1939 : Joseph-Réginald Biron
1940-1945 : Stéphane Desmazières (puis évêque de Beauvais)
1945-1991 : Jean-Baptiste Ecrepont

Benoît Pénicaud - L'Histoire de Dieulivol

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